Le restaurant Globe fête ses 20 ans : Entrevue avec Roberto Pesut

Dans une ville gastronomiquement en pleine forme comme Montreal et où l’on retrouve plus de restaurants per capita qu’à New York, les élus restent et seront toujours peu nombreux à célébrer leur 20 ans d’existence. Un défi que le restaurant Globe a su relever avec brio!

Je me suis donc entretenue avec Roberto Pesut, l’un des propriétaires de ce restaurant de la « Main » qui à travers les années est devenu une icône de la scène culinaire, une institution à créer de grands chefs et un pilier du « nightlife », afin de découvrir la recette qui se cachait derrière autant d’années de succès.


Quelle fut l’inspiration derrière ce choix de carrière ? Mon amour pour la nourriture et la place que celle-ci occupe dans la culture italienne qui est la mienne et cette coutume de la grande « popote » du dimanche avec toujours une vingtaine ou trentaine d’invités à table; toute cette chaleur et convivialité m’a donné envie de cuisiner à plus grande échelle pour la famille et les amis.

Est-ce que cette transition fut facile et naturelle? Nous n’avions évidemment pas l’expérience d’aujourd’hui, par contre mes associés et moi avons eu la chance d’être bien entourés, que ce soit par un bon chef ou un comptable consciencieux. Ce fut une école pour nous tous, un échange de connaissances et de compétences, où chacun apprenait des uns des autres.

Qu’est-ce qui fait le succès du Globe depuis toutes ces années ? La recette gagnante est la règle du trois tiers accueil/service/cuisine

Quelle est la meilleure partie de ton travail, quelle est la plus laborieuse ? Ce que j’aime le plus de mon travail est de voir quelqu’un quittant une table avec un grand sourire, car un client satisfait me rend satisfait. 

La partie la plus difficile dans cette aire technologique d’aujourd’hui, avec les nombreux sites Web, blogues et réseaux sociaux, est que chaque client a le potentiel d’être un « écrivain culinaire » ou du moins de se prétendre comme tel. N’importe qui est en mesure de faire circuler une information, qui selon moi atténue la crédibilité du vrai « food  writer » qui a suivi une formation dans le domaine.

Après 20 ans de métier, qu’est-ce qui te garde encore motivé à ce jour? Je suis toujours heureux en me réveillant le matin, car aucune de mes journées ne se ressemble depuis 20 ans. Que ce soit de planifier mon prochain voyage culinaire, d’élaborer le nouveau menu saisonnier, de choisir l’uniforme des employés, d’organiser un événement spécial, il y a toujours quelque chose de différent et d’excitant qui me garde motivé.

Quel(s) conseil(s) pourrais-tu donner à un jeune entrepreneur qui désire se lancer dans la restauration ?  De toujours garder en tête la recette gagnante du trois tiers, accueil/service/ nourriture. De s’entourer de gens qui ont chacun leurs propres forces et compétences, et de ne pas essayer de porter tous les chapeaux. « L’arrière-scène » est tout aussi importante, car avec le grand nombre de pertes que connaît un restaurant, le département de comptabilité joue un très grand rôle.

Rester terre à terre et humble, ne pas s’enfler la tête et ne pas abuser de l’alcool, ça vous ruinera avec le temps. Toujours dire merci et bienvenue à vos employés, vos associés, vos clients, jusqu’aux plongeurs, et toujours être respectueux. Ne pas prendre le succès pour acquis. 

Comment réussissez-vous à vous démarquer continuellement dans une ville aussi compétitive gastronomiquement ? Nous devons toujours rester à l’affût, que ce soit par des voyages réguliers à l’étranger, à New York, Chicago, Paris, Milan, afin de découvrir des nouveautés et des concepts susceptibles de s’appliquer à une ville comme Montreal. L’innovation est primordiale. 

De quelle façon le paysage culinaire a-t-il changé depuis 20 ans à Montreal? La scène culinaire a évolué de façon extraordinaire au Québec et à Montreal, par rapport à d’autres endroits. Nous sommes extrêmement choyés d’avoir autant de talents. Le phénomène « Food Network » joue certainement un rôle pour cet engouement, et cette passion nouvelle pour la cuisine se développe chez des gens de plus en plus jeunes.

Comment expliques-tu qu’autant de grands chefs aient fait leurs débuts au Globe? (Pensons Martin Picard, David McMillan, Frédéric Morin, Chuck Hughes…)  Nous avons donné la chance à ces jeunes chefs d’exprimer leur vision personnelle, nous les avons laissés évoluer sans les restreindre dans leur créativité.

Le Globe est reconnu pour avoir accueilli de nombreuses vedettes internationales, as-tu une anecdote marquante à nous raconter ? L’un de mes souvenirs les plus cocasses fut lors du tournage de Some of all fears en 2002 avec Ben Afflect. Alors qu’il était devenu un ami de la maison, il m’a demandé s’il pouvait faire le barman pour quelques minutes. Je le lui ai donc accordé, et celui-ci a réussi à accumuler plus de 1000$ en une vingtaine de minutes, qu’il a remis à notre personnel. Disons que malgré le fait qu’il donnait l’alcool gratuitement aux clients, ce fut un excellent coup marketing…qui n’a pas de prix!

Qu’est-ce que tu aimes le plus de Montreal ? Sa joie de vivre! De plus, le client Montrealais est instruit autant au niveau des vins que de la nourriture. Par contre, ce que j’aime de Montreal n’est certainement pas sa politique (rire).  #pastagate

Avec les longues heures de travail que cela implique, quel est ton secret de jeunesse et comment arrives-tu à garder un mode de vie équilibré ? Ne pas abuser de ce qui nous entoure et de toujours garder l’équilibre entre le travail, la famille et soi-même. Il est important de prendre soin de soi que ce soit par des voyages, en faisant de l’exercice, en relaxant devant un feu de foyer, etc. Il faut apprendre à décrocher complètement, à fermer le téléphone même si ce n’est pas toujours facile.

Quels sont vos plans à toi et à tes associés pour les 20 prochaines années ? Nous avons de beaux projets avec le groupe Buonanotte que nous sommes à concrétiser ainsi que pour le Globe, mais cela reste un secret pour le moment, alors « stay tuned »!